Lors de ce stage, nous avons senti chez Terre d’Alchimie des huiles encore peu connues et peu distillées. Ces huiles essentielles sont toutes belles et olfactivement intéressantes. Pour certaines d’entre elles, nous avons tenté de les comparer avec d’autres HE de compositions proches. C’est un travail que nous propose Michel Faucon, qui dans son cheminement, s’est imposé à lui : étalonner puissance et subtilité olfactive des huiles de composition chimique proche permet de faire un pas de plus vers un travail de précision toujours dans l’optique d’améliorer le soin au patient.
Cette approche vient compléter le travail déjà réalisé avec Michel Faucon mais permet en effet d’aller un cran plus loin dans notre connaissance des huiles essentielles. Pour réaliser ce travail, il nous faut toujours et encore utiliser notre nez, l’éduquer, « faire nos gammes » comme dit Michel Faucon. Il convient en effet d’avoir une bonne connaissance de la biochimie d’une huile essentielle et de la comparer à nos sensations / perceptions sensorielles, à tous nos ressentis pour tenter de la faire parler.
C’est ainsi que nous nous interrogeons sur la place sensorielle et thérapeutique que pourraient prendre ces huiles essentielles nouvellement étudiées parmi le large panel des huiles courantes dont nous disposons déjà et que nous connaissons bien. « L’aromathérapie est aussi l’art de la nuance ! » dirait Michel Faucon.
Nous avons essayé d’appliquer cette méthode des comparaisons aux huiles essentielles d’Agastache et de Vergerette du Canada, que je vous présente dans cet article.
1. Huile essentielle d’Agastache
1.1. Carte d’identité de l’Agastache
Très jolie plante ornementale aux magnifiques hampes florales violettes, l’Agastache (Agastache foeniculum) est originaire d’Amérique du Nord et bien implantée dans les contrées tempérées. Elle peut s’épanouir à hauteur d’1,5 mètres. Elle fait partie de la famille des Lamiacées (au même titre que romarin, basilic, mélisse …) et comme telle, ce sont les sommités fleuries qui sont distillées.
Si vous avez un jardin, il est fortement conseillé de la planter car elle vous apportera couleur et odeur. De plus, l’agastache est l’amie des abeilles et leur offre tout le nectar nécessaire. Elle dégage un parfum aromatique délicieux, anisé et fruité. Elle est très simple de culture, pousse vite et fleurit abondamment. Par ailleurs, elle se replante seule sans devenir envahissante.
1.2. Biochimie de l’Agastache
1.2.1. Agastache et ses monoterpènes, oxydes, sesquiterpènes et … méthyl chavicol !
Deux monoterpènes (limonène et pinène), rien de bien original. Une trace d’oxydes qui offre une bouffée d’air frais. Et une pointe de sesquiterpènes ce qui dénote une distillation bien menée (puisque comme je l’ai déjà écrit, c’est une molécule lourde qui ne sort qu’en fin de distillation), leur présence ici est donc un gage de qualité grâce à une distillation suffisamment longue.
Néanmoins, ce qui attire davantage l’attention, c’est qu’au même titre que le basilic tropical Ocimum basilicum et l’estragon Artemisia dracunculus, l’huile essentielle d’Agastache contient environ 85 à 90% de méthyl chavicol. Nous savons que cet éther est fortement antispasmodique musculotrope et neurotrope.
Cependant, à chimie égale, le profil thérapeutique ne sera pas totalement identique. Il faut en effet savoir considérer le « climat » de la plante ainsi que sa subtilité. C’est seulement après cette étude attentive qu’il deviendra possible de postuler quelques hypothèses concernant le génie de son remède, sa médecine.
1.2.2. Agastache face au basilic tropical et à l’estragon
Selon Michel Faucon, à regarder le basilic, morphologiquement tout en rondeur, tout vert tendre, tout mignon, on peut imaginer que son activité est plus douce et plus mentale, bref plus yin, que celle de l’estragon dont la silhouette est d’aspect plus yang, plus acérée. L’estragon serait davantage physique avec une action plus adaptée aux profils rancuniers et nerveux. Comme l’aime à préciser Michel Faucon, « cela n’est pas écrit dans les livres mais issu de mes observations sur le terrain et de mon expérience auprès des patients ».
L’estragon est plutôt physique, il permet la digestion et son activité est fortement antihistaminique. Quant au basilic, sa composante mentale est plus évidente. Il pourra être proposé aux hyperémotifs.
Comment positionner notre jolie Agastache dans ce duo ? Nous adoptons donc la méthode de l’olfaction. Les molécules nous guideront vers une première connaissance fondamentale mais ensuite, laissons faire notre nez et notre intuition. L’empirisme, toujours l’empirisme : nos impressions concrètes du terrain et notre rapport direct à l’huile et à son odeur ont une vraie valeur.
1.3. Olfaction de l’Agastache
La question sera donc de la positionner par rapport au basilic tropical et à l’estragon afin de définir quelle pourrait être sa place dans un arsenal thérapeutique.
1.3.1. Agastache, moins physique que l’estragon
Les premières notes de l’Agastache sont anisées, vertes, aquatiques, fraiches, douces, rondes. Je ressens une salivation et un tropisme digestif ainsi qu’une expansion de la respiration. Elle m’imprègne. Je m’interroge si elle n’aurait pas aussi une action intéressante sur le psychisme.
De premier abord et à l’unanimité, l’Agastache nous semble moins physique, beaucoup moins yang que l’estragon que nous avons senti aussi après coup.
1.3.2. Agastache, capacité neuro-régulatrice
Cependant, ce qui nous permet ici de pouvoir l’étalonner un peu mieux est sa psychoactivité, et donc sa capacité neuro-régulatrice potentielle : l’huile essentielle d’Agastache agit sur le SNC (système nerveux central) et sans doute sur les dystonies neuro-végétatives. Son action sur le psychisme est ressentie par tous les participant(e)s comme étant évidente à l’olfaction.
L’Agastache se situerait donc entre le basilic et l’estragon : son climat se montre intermédiaire. Elle est digestive, mais moins que l’estragon. Plus mentale que l’estragon, elle l’est néanmoins moins que le basilic.
Exercice intéressant que celui de respirer, de sentir et ressentir ces huiles dont la chimie est assez similaire. D’une part pour éduquer notre nez, et d’autre part, pour « étalonner nos valeurs par une somme de comparaisons concrètes, ce qui permet toujours d’enrichir notre connaissance, de gagner en précision. Un tel exercice est toujours très informatif » comme l’aime à le répéter Michel Faucon.
L’Agastache pourrait-elle représenter une alternative sérieuse au basilic ou à l’estragon ? Nous le pensons. Pour le moins, elle mérite de se placer dans une aromathèque, entre l’huile de basilic tropical et l’huile d’estragon, car telle semble bien être sa place !
2. Huile essentielle de Vergerette du Canada
2.1. Vergerette du Canada (Erigeron canadensis) : carte d’identité
Petite Astéracée originaire du Canada, la Vergerette du Canada est une plante pionnière qui pousse aujourd’hui partout. C’est la plaie des agriculteurs. Néanmoins, elle est peu connue en aromathérapie.
2.2. Olfaction de la vergerette du Canada
2.2.1. Citron, fraîcheur : la joie
Au premier abord, je lui ai trouvé des similitudes avec le citron : une certaine fraîcheur, un côté acidulé (comme la limette). C’est une huile que j’ai associée à la joie, à l’enfance, la jeunesse. J’ai vu la petite maison dans la prairie, ce gadin de la petite fille, qui dévale la pente dans l’insouciance, en pleine spontanéité de l’enfance.
Et puis l’odeur s’efface, je perds sa trace. L’enfant qui me tient la main me dit alors « Allez vas-y, c’est ton tour ».
2.2.2. Vergerette du Canada, notes de pomme
Puis arrivent alors des notes de pomme. Et hop, je me retrouve dans le verger de mon amie d’enfance Ophélie. Je tourne et tourne sur moi, les bras ouverts, la tête renversée dans le moment présent.
2.2.3. Vergerette du Canada : huile joyeuse
Cette huile essentielle est joyeuse et nous invite à l’abandon. Je pourrais imaginer proposer cette huile pour quelqu’un qui se sentirait un peu triste. Une personne désireuse de retrouver une certaine harmonie. Cela est assez étonnant que cette petite plante ait autant de couleurs.
Néanmoins, je ne peux m’empêcher de m’interroger : la vergerette peut-elle supplanter les essences des agrumes anti-tristesses, dont le rôle est de nous égayer, de nous ré-enchanter ? Quoi qu’il en soit, si vous souhaitez la découvrir, vous la trouverez chez Terre d’Alchimie.
Voilà pour ce petit tour d’horizon sur ces deux huiles essentielles d’Agastache et de Vergerette du Canada. Au prochain épisode, nous découvrirons l’huile magnifique de Séquoia géant, tout un monde s’ouvrira à nous.