Portrait: Lesabotsy, tradipraticien Ă  Vohimana

Je vous propose de faire la connaissance de Lesabotsy, tradipraticien Ă  Vohimana. Pour mieux comprendre ce qu’est un tradipraticien, je vous renvoie Ă  l’article sur la mĂ©decine traditionnelle.

Dans ce nouvel article, je vous prĂ©sente son parcours succinctement et sa mission d’aujourd’hui. En effet, au sein du laboratoire de Vohimana, qui est en attente de recevoir du matĂ©riel de prĂ©paration financĂ© grĂące Ă  une donation de la marque Perfumista, il participe aussi au dĂ©veloppement d’une nouvelle mĂ©decine. Être tradipraticien veut aussi dire aujourd’hui participer au dĂ©veloppement d’une mĂ©decine locale plus ample et variĂ©e qui s’enrichit d’autres ingrĂ©dients et d’extraits de plantes plus Ă©laborĂ©s. On laisse tomber le cĂŽtĂ© « tradi » quoi.

Par ailleurs, je vous propose une vidĂ©o des moments partagĂ©s avec lui et les Ă©quipes. J’espĂšre que vous aurez autant de plaisir Ă  les regarder que j’en ai eu Ă  les faire (remerciement encore Ă  Nabih pour les nombreuses pĂ©pites filmĂ©es qui m’ont permis de largement complĂ©ter mes propres images). Merci encore Ă  Saroy et Nabih (L’Homme et l’Environnement), Lova pour son soutien sans faille, Fanja et Docteur Nina pour leur belle compagnie, Didier et GeneviĂšve, Geoffray sans oublier Murielle et ma petite mĂšre. Puis les cuisiniĂšres de Vohimana qui nous ont rĂ©galĂ©s, tous les guides et les porteurs. Tellement de sourires croisĂ©s. 

Mais commençons, c’est Lesabotsy qui nous intĂ©resse ici.

Lesabotsy, ĂȘtre tradipraticien aujourd’hui

C’est en 1992 que Lesabotsy a commencĂ© Ă  s’intĂ©resser aux plantes. Je ne sais pas exactement quand il est devenu ce qu’on appelle un tradipraticien.

Lesabotsy et feu Chantal Rakotoarison au Labo de Vohimana

En 2008, il a travaillĂ© avec Mme Chantal, comme il l’appelle, alors responsable Recherche & DĂ©veloppement pour l’ONG Homme et Environnement, dĂ©cĂ©dĂ©e depuis. C’est en Ă©tant son assistant qu’il a dĂ©couvert les huiles essentielles. Avec elle, Lesabotsy a rĂ©alisĂ© ses premiers pas dans la distillation. Lesabotsy avoue que Â« pour lui, au dĂ©but, c’était difficile Â».  

Association Vohimana Salama 

En 2010, il intĂšgre l’association des tradipraticiens de Vohimana Salama qui compte alors 15 membres. De 2010 Ă  2016, Lesabotsy a Ă©tĂ© responsable des distillations et des distillateurs. A ce jour, il ne fait plus partie de l’association mais garde toujours un Ɠil sur l’activitĂ©. Il est toujours dans les parages 🙂 C’est un peu son bĂ©bĂ©. Le programme des collectes et plantations ainsi que la gestion des ressources et du bois de chauffe durable a Ă©tĂ© mis en place par Lesabotsy.

Distillation du gingembre bleu pour Chanel Beauté

Gingembre sur la rĂ©serve de Vohimana – Photo Le Trek des Essentielles

De 2012 Ă  2018, Lesabotsy a Ă©tĂ© le distillateur officiel pour la sociĂ©tĂ© Chanel BeautĂ©. En charge de distiller le gingembre bleu et le gingembre shampoing (zerumbet), Lesabotsy est partie prenante de cette belle aventure que je vous ai racontĂ©e ici.

ParallĂšlement, Lesabotsy a participĂ©, avec les autres membres de l’association, Ă  l’écriture d’un livre sur les plantes mĂ©dicinales de Vohimana, le tout financĂ© par Chanel BeautĂ©. Au-delĂ  des descriptions botaniques des plantes, leurs utilisations traditionnelles sont Ă©videmment prĂ©sentĂ©es. 

L’Homme et l’Environnement et Olivier Behra

En 2010, Lesabotsy collabore avec l’ONG L’homme et l’environnement. C’est Ă  ce moment qu’il approfondit sa collaboration avec Olivier Behra, le fondateur de l’ONG. Olivier travaillait Ă  un projet pour la prĂ©servation des batraciens et l’ensemble de la forĂȘt de Vohimana. Ensemble, ils mĂšneront une rĂ©flexion poussĂ©e sur le dĂ©veloppement d’activitĂ©s gĂ©nĂ©ratrices de revenus pour les populations locales. Et toujours dans une optique de conservation de l’environnement Ă©conomiquement viable. L’aventure continue aujourd’hui comme vous le savez. 

Lesabotsy et Aroma Forest 

La sociĂ©tĂ© Aroma Forest existe plus de 20 ans. Aroma Forest a installĂ© l’alambic prĂ©sent sur le site en 2006 et soutenu les premiĂšres plantations de Ravintsara en 2004. Travail de terrain, recherche et innovation ont permis de maĂźtriser les critĂšres optimum de distillation et de comprendre les

influences de terroirs sur la qualitĂ© des huiles essentielles. La qualitĂ© est primordiale tout comme les prix proposĂ©s Ă  la clientĂšle, le tout en optimisant les impacts sociaux et environnementaux. L’üle de Nosy Be avec ses productions d’ylang ylang. La cĂŽte est avec ses poivres et girofles. 

Les gĂ©raniums des hauts plateaux. Gingembres frais et Ravintsara issus de la rĂ©serve expĂ©rimentale de Vohimana. L’ensemble des productions sont rĂ©alisĂ©es sans pesticides ni engrais chimiques quels qu’ils soient. Elles peuvent ainsi ĂȘtre certifiĂ©es bio Ă  la demande.

Photo crédit: Olivier Behra

NĂ©anmoins, on reviendra sur Aroma Forest. Aujourd’hui, ce qui compte, c’est que Lesabotsy soit en charge de l’aspect R&D. Dans son alambic du laboratoire de Vohimana, il rĂ©alise les tests de distillation sur les plantes mĂ©dicinales et aromatiques.

Sur la photo, VĂ©ronique, la responsable de la fabrication des baumes, Maeva la responsable Recherche et DĂ©veloppement, Olivier et Lesabotsy devant le laboratoire de la forĂȘt en Novembre 2022.

Forum des Peuples Racines

En juin 2023, Lesabotsy fera le dĂ©placement en France pour participer au Forum des Peuples Racines Ă  Strasbourg. Aux cĂŽtĂ©s d’Olivier Behra et en tant que tradipraticien, Lesabotsy animera un atelier dĂ©diĂ© au savoir traditionnel malgache, Ă©voquera les huiles essentielles ainsi que la prĂ©servation de la biodiversitĂ© du site de Vohimana. 

A cette occasion, il est fort possible que le livre Ă©voquĂ© prĂ©cĂ©demment, financĂ© par Chanel BeautĂ©, soit rĂ©Ă©ditĂ©. Il pourra alors ĂȘtre mis en vente sur le site internet d’Aroma Forest ou directement sur le site de Vohimana. Et si les dĂ©lais le permettent, ce livre pourrait ĂȘtre proposĂ© au Forum. Le

Alors, si vous le pouvez, pourquoi ne pas l’inscrire dans votre agenda et faire un petit tour Ă  Strasbourg le weekend des 3 et 4 juin ? 

Lesabotsy Ă  Vohimana

Nous avons eu la chance de passer quelques moments privilĂ©giĂ©s avec Lesabotsy. Vous pouvez cliquer ici pour accĂ©der Ă  la vidĂ©o de prĂ©sentation. Je vous reporte ici par Ă©crit quelques enseignements de Lesabotsy que vous retrouverez aussi dans la vidĂ©o.  

Les hedychium

Comme vous le verrez dans la vidĂ©o, il existe 3 espĂšces d’hedychium Ă  Vohimana. Pour reconnaĂźtre un hedychium, il faut regarder la face intĂ©rieure de la feuille : elle doit ĂȘtre poilue lĂ©gĂšrement tel un duvet blanc. Sur le site, il y a le Flavescens, le Coronarium (ou gingembre papillon) et le Peregrinum

Pour le moment, seul le gingembre papillon est produit en huile essentielle. NĂ©anmoins, Olivier Behra et Lesabotsy ont plantĂ© 600 kilos d’Hedychium peregrinum en 2011. Deux huiles essentielles en sont issues: l’une, des feuilles et l’autre, du rhizome. NĂ©anmoins, un peu de patience avant de les dĂ©couvrir, les phases de recherche et dĂ©veloppement sont en cours.

Sur cette photo, vous voyez le cĂŽtĂ© petit duvet blanc de l’Hedychium. Sa cousine, la Maniguette Aframomum angustifolia, qui ressemble beaucoup aux hedychium, a des pois rouges sur le revers des feuilles.

Salvia coxsynia 

Cette plante est utilisĂ©e contre la sinusite (mais je n’ai pas l’image). Disons que c’est une espĂšce de Salvia. Elle s’avĂšre aussi efficace en tisane qu’en huile essentielle. En utilisation traditionnelle, 2 gouttes seulement directement dans le nez (de la tisane) pendant 2 Ă  3 jours. 

Tetradenia riparia

Cette plante est appelĂ©e « faux patchouli Â» du fait de sa ressemblance avec le vrai, donc. Encore une lamiacĂ©e. C’est une plante mĂ©dicinale trĂšs efficace. Les matrones africaines y ont frĂ©quemment recours pour traiter les post-partum. Utile aussi en cas de grippe et de fiĂšvre sous sa forme infusĂ©e. 

Drosera madagascariensis 

Drosera madagascariensis – Photo Le Trek des Essentielles

Cette micro et trĂšs jolie petite plante a de fantastiques propriĂ©tĂ©s anti-inflammatoires (https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/16041727/). De grandes quantitĂ©s sont exportĂ©s de Madagascar pour fabriquer des sirops antitussifs. Elle est aussi utilisĂ©e en sĂ©chĂ©e pour traiter l’énurĂ©sie. Petite mais costaude.

Clidemia hirta

On la voit PARTOUT Ă  Madagascar. ConsidĂ©rĂ©e comme envahissante dans les zones tropicales, elle a nĂ©anmoins tout pour plaire. 

Dans la vidĂ©o, on voit Lesabotsy l’appliquer sur une plaie. Ses feuilles Ă©crasĂ©es agissent comme du mercurochrome. Son jus contient des saponines qui moussent donc et dĂ©sinfectent. A conserver en place sur toute plaie cutanĂ©e. 

NĂ©anmoins, cette plante fait partie de la famille des MĂ©lastomatacĂ©es, relative au mot estomac. Pour traiter les maux d’estomac, il convient de rĂ©cupĂ©rer 3 Ă  4 tiges avec les racies, de la mĂ©langer avec de la centella asiatica (Talapetra en malgache) fraĂźche (50 g), faire infuser le tout dans de l’eau chaude pendant 15 minutes. Boire 2 Ă  3 fois par jour avant les repars pendant 3 jours. La feuille de cette plante est drue et douce Ă  la fois. Elle est donc utilisĂ©e comme papier hygiĂ©nique mais je n’ai pas testĂ© ! 

Cette plante s’est bien implantĂ©e Ă  Madagascar mais n’est pas endĂ©mique. 

Les basilics (Romba en tout genre)

Lesabotsy nous en prĂ©sente pleins (voir la vidĂ©o). Je n’ai pas tout retenu. Sauf qu’il a beaucoup ri en disant que le basilic Ă  mĂ©thyl chavicol est un super booster cĂ©rĂ©bral et que tout monde gagnerait Ă  le boire en tisane ou le sniffer au flacon ! 

L’hĂ©ritage et la postĂ©ritĂ©

Lesabotsy craint pour le futur. Un jeune homme, qui s’appelle Martial, le seconde bien aujourd’hui. Mais Martial sera-t-il assez intĂ©ressĂ© pour succĂ©der Ă  Lesabotsy ? Ce dernier note un dĂ©sintĂ©rĂȘt gĂ©nĂ©ral de la jeunesse pour la flore et les plantes. 

Lesabotsy au laboratoire expĂ©rimental de Vohimana – Photo crĂ©dit Le Trek des essentielles

C’est pourquoi Lesabotsy est en train d’écrire un livre. Il est secondĂ© par Maeva (biochimiste, elle apparaĂźt dans la vidĂ©o sur la prĂ©paration des baumes) et Saroy (ONG L’Homme et l’Environnement) dans cette aventure. A la main, Lesabotsy couche sur le papier ses connaissances, des photos en couleur sont prĂ©vues dans cet ouvrage. La transmission ici passera par l’écrit, et non plus par la tradition orale (comme cela Ă©tait le cas dans les civilisations anciennes africaines). 

Lesabotsy fait partie de ces hĂ©ros inconnus. A sa maniĂšre il Ɠuvre pour prĂ©server son petit bout de terre et laisser un hĂ©ritage aux suivants. Passer Ă  la postĂ©ritĂ© tout en crĂ©ant de la nouvelle Connaissance.

Merci Lesabotsy pour les Ă©tincelles dans tes yeux et ton rire communicatif.

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2 Replies to “Portrait: Lesabotsy, tradipraticien Ă  Vohimana”

  1. Merci Johanne !
    IL se doit de ne pas le laisser seul Ă  penser et Ă  agir LESABOTSY
    IL se doit de l’aider les 7 jours de la semaine LESABOTSY
    IL se doit de compléter ses connaissances et les transmettre LESABOTSY
    IL se doit de mettre la main à la terre et à tous les éléments LESABOTSY

    1. Beaucoup de choses restent Ă  faire. Merci Didier.

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