Michel Pidoux, études et huiles essentielles de Madagascar 

Je vous avais parlé ici de ma rencontre avec Michel Pidoux chez Aubance Essentielles l’été dernier. Comme indiqué, je ne l’ai pas lâché depuis ! Et j’ai pu le rencontrer chez lui en mai pour réaliser une interview : nous y parlons de son séjour à Madagascar pendant lequel il a travaillé sur le terrain avec les équipes de médecins pour aboutir à des études dites observationnelles, on y parle de son engagement dans l’association Tamtam Phyto Aroma, plus globalement, on parle huiles essentielles de Madagascar ! Mais avant la vidéo, en toute fin d’article, je vous propose un article résumant son travail sur place.

Michel Pidoux et Madagascar 

Huiles essentielles de Madagascar : usages et résultats cliniques

Michel Pidoux est anciennement enseignant-chercheur en biologie à l’université d’Angers. 

Passionné depuis fort longtemps par les huiles essentielles et persuadé de leur potentiel thérapeutique, il a passé 4 années à Madagascar sur les Hauts-Plateaux pour intégrer l’usage des HE dans les pratiques des médecins malgaches tout en travaillant bénévolement au Laboratoire d’analyses de l’hôpital d’Antsirabe.

Suite à ces années malgaches, il a publié un livre relatant ces études d’observations de cas cliniques  :

« Huiles essentielles de Madagascar : usages et résultats cliniques ». 

Voici un résumé de son travail et par-là, de son livre.

L’OMS et la médecine traditionnelle

Mener une étude scientifique « randomisée et en double aveugle » (quel nom barbare) « reconnue » par la science coûte beaucoup d’argent et nécessite une grosse mise en œuvre. Il n’est pas toujours possible de procéder de la sorte, vous pouvez imaginer.

Etudes observationnelles 

Lors de son action à Madagascar, Michel a donc réalisé des observations de séries de cas, ou observationnelles, méthode approuvée par l’OMS, s’agissant de médecine traditionnelle. L’OMS préconise « d’instituer des méthodes appropriées d’évaluation pour faciliter la mise au point d’une réglementation et d’un système d’homologation pour la médecine traditionnelle » sans pour autant que les « recherches de preuves d’efficacité et d’innocuité des médecines traditionnelles ne fassent obstacle à l’application et au développement de celles-ci » – Michel Pidoux dans Huiles essentielles de Madagascar

Et il est important de préciser qu’une médecine est considérée comme « traditionnelle » lorsqu’elle est pratiquée depuis un temps suffisamment long (au-moins 30 ans) pour l’utilisation de traitements à base de plantes. Ce qui n’est pas le cas des huiles essentielles à Madagascar. En revanche, les plantes dont sont issues ces huiles essentielles y sont d’usage traditionnel.

Ces études sont menées sur le terrain en situation naturelle et normale lors d’une consultation tout à fait classique. Pas de laboratoire ici. Le praticien reste maître du diagnostic, du traitement à suivre et de son mode d’application. C’est remettre clairement le praticien au cœur de la relation avec le patient

Dans cette approche, « … l’effet placebo n’est pas isolable et fait partie intégrante du soin, probablement d’ailleurs comme dans la pratique quotidienne des médecins conventionnels selon le degré de confiance accordé au médecin » – Michel Pidoux dans Huiles essentielles de Madagascar

Contraintes applicables 

« Alors que la médecine conventionnelle n’utilise principalement que des médicaments constitués d’un seul principe actif (une molécule), les médecines traditionnelles font usage de produits complexes – et variables en composition – comme les plantes et leurs extraits » – Michel Pidoux dans Huiles essentielles de Madagascar

Dans ce contexte défini par l’OMS, Michel Pidoux a composé avec certaines contraintes applicables pour le bien-fondé de toute son action. 

Les modes d’administration et les posologies ont été définis en se référant aux publications existantes telles que :

  • L’aromathérapie exactement, œuvre phare écrite par le Docteur Pénoël et Pierre Franchomme en 2000
  • Ou encore La science des huiles essentielles médicinales de Pierre Franchomme (2015). 

Par ailleurs, la disponibilité du traitement, sa durée et son coût, la qualité de vie du malade et les effets secondaires notoires sont à considérer. Sans omettre le degré d’acceptabilité par la population. Dans ce cas de figure, les populations avaient la sensation de se rapprocher de la médecine traditionnelle s’agissant d’huiles issues des plantes de  leur territoire. 

Faire équipe avec les médecins malgaches

Michel a fait équipe avec 7 médecins malgaches fortement désireux de collaborer à ces études notamment dans le domaine de l’infectiologie. Pendant toute la durée de celles-ci, ils ont rempli avec minutie des feuilles de soins détaillées qui ont permis de réaliser des synthèses sur les effets des différents traitements selon les pathologies. 

Il est à noter que certains patients perdus de vue (c’est-à-dire qu’ils ne sont jamais revenus par la suite en consultation) n’entrent pas dans les résultats. 

Sélection des huiles essentielles pour les études

La volonté était de ne pas dépasser l’intégration de dix huiles essentielles pour les études : non seulement pour en maîtriser parfaitement les propriétés mais aussi pour développer une parfaite connaissance de celles-ci en thérapeutique. Jugées essentielles pour les maladies les plus courantes, il va sans dire que ces huiles sont forcément malgaches et donc disponibles facilement sur le territoire.  

Choisies pour leur polyvalence d’action et leur support au renforcement du système immunitaire, voici les huiles choisies et intégrées dans des protocoles aromatiques par la suite :

Huile essentiellePathologieMoléculesPropriétés
Niaouli Melaleuca quinquenerviaRespiratoire Et peau1,8 cinéole (oxyde)Antivirale/ antifongique/ anti-catharrale/ mucolytique
Ravintsara Cinnamoma camphora IDEM IDEM 
Saro Cinnnamosma fragransIDEMIDEM IDEM 
Géranium Bourbon Pelargonium  asperum cv BourbonPeauGéraniol (monoterpénol)antibactérienne/ anti-inflammatoire
Géranium Bourbon Pelargonium  asperum cv Bourbon Acétate de géranyle (ester)antispasmodique
Girofle Syzygium aromaticumInfectionsEugénol (phénol)Fort pouvoir antimicrobien/ antibiotique
Cannelle écorce Cinnamomum verumInfections et stimulation immunitaireCinnamaldéhyde (aldéhyde aromatique)IDEM 

Synergies d’huiles essentielles pour les traitements

Trois synergies d’huiles essentielles ont été définies pour traiter les pathologies les plus courantes. 

Mélange « Circoncision et post-opératoire » : 10% d’huile essentielle de Saro et 90% d’huile végétale de Calophylle

Jeune plant de Saro (Mandravasarotra) – credit photo #OlivierBehra

Ce mélange était appliqué 2 fois /jour comme cicatrisant, anti-inflammatoire et préventif des infections. Notamment utilisé après les circoncisions puis sur les plaies postopératoires suturées. Les résultats cliniques ont montré une cicatrisation accélérée (moins de 5 jours en moyenne).

Mélange « Peau » : Géranium type Bourbon 10%, Saro 10%, niaouli 10% mélangées à 70% d’huile de tournesol.

Géranium Rosat var. Bourbon (Pélargonium graveolens) – Credit photo #MichelSommerard

Cette forte concentration (30%) s’oppose à celles plus diluées préconisées en aromathérapie cosmétique. Seulement, dans les cas ici, certaines des pathologies rapportées étaient mycoses de la peau et des ongles. Il faut donc « frapper » fort. En revanche, pour des pathologies de terrain allergique type eczéma ou petites plaies , le mélange était 10 fois plus dilué.

Ravintsara – Credit photo #MichelSommerard

Mélange « Respiratoire » contenant 2 huiles essentielles principales : niaouli et ravintsara, 20% de chaque dans 60% d’huile de tournesol. Très forte concentration pour les  maladies aigües ou chroniques, avec des doses mesurées et progressives en fonction de l’âge du patient et de la durée du traitement. 

Important : chaque numéro de lot était consigné dans un document de suivi et les médecins se voyaient remettre les flacons lors des rencontres dédiées aux échanges des pratiques. 

Revue Phytothérapie : publications officielles

Deux études ont fait l’objet de publications officielles dans la revue internationale Phytothérapie. Les précautions d’usage ont été respectées :  par exemple le test allergique (avec le pli du coude). Puis, l’aspect olfaction n’a pas été négligé non plus puisque l’adhésion du patient va de pair avec l’appréciation de l’odeur. N’omettons pas cet aspect psycho-émotionnel qui est primordial. 

Etude sur les affections dermatologiques

Cette étude portait particulièrement sur les traitements topiques d’affections dermatologiques à l’aide de la synergie « Peau » (présentée ci-dessus) : herpès, mycoses, infections à dermaphytes (teigne ou autre infection fongique), allergies cutanées telles que eczéma atopique, dyshidrose, urticaire, plaies et escarres, abcès, dermatites bactériennes et virales (varicelle, zona, herpès), brûlures, psoriasis… 104 cas de patients ont été reportés. 

Les dermatites bactériennes, virales ou parasitaires ont été traitées avec une haute concentration en huiles essentielles (30%). Les formes de terrain plus allergique comme l’eczéma, le psoriasis, dyshidrose ont été traitées avec une dilution 10 fois moins concentrée soit à 3%. 

Résultats 

Il s’avère que les propriétés du mélange Peau ont eu une action efficace « antiprurigineuse, antiinflammatoire, antalgique, cicatrisante, antiinfectieuse et immunomodulante. Les résultats ont été jugés équivalents ou meilleurs que ceux qui auraient pu être obtenus avec des traitements classiques, souvent indisponibles en zones rurales ou trop chers. Les réactions de type allergique au contact des huiles essentielles ont été rares (<1%). Les diagnostics ont été vérifiés par des spécialistes en dermatologie et les résultats ont été discutés au sein du groupe » (cit. extraite du livre). 

Etude sur la circoncision et cicatrisation post-opératoire

Une autre étude portant sur la circoncision et cicatrisation post-opératoires a aussi été publiée. Menée sur 3 ans avec 503 cas, elle a donné des résultats très encourageants. 

« Sur les 503 circoncisions, il y a eu seulement 2 retours pour infection, c’est-à-dire 0,4% des enfants soit 10 à 20 fois moins qu’avant l’étude. La concentration de 10% de Saro s’est donc révélée suffisante pour inhiber les pathogènes. Même dans un contexte de niveau d’hygiène familial très bas. Tous les médecins ont constaté une cicatrisation plus rapide (moins 5 jours en moyenne) et de meilleur aspect » (cit. extraite du livre). 

Huiles essentielles, une véritable alternative 

Les huiles essentielles représentent une véritable alternative aux traitements classiques. Madagascar qui est une île riche en huiles essentielles mais un pays extrêmement pauvre peut réellement y trouver son compte. Il est nécessaire d’œuvrer en ce sens pour intégrer ces méthodes « aux Soins de Santé Primaires ». Les affections courantes peuvent très bien être soignées par des protocoles rigoureux issus de l’aromathérapie. Et les populations rurales via leurs agents de santé et médecins généralistes communautaires pourront en bénéficier pour un coût tout à fait modique et accessible.   

Valeur statistique vs empirisme

Les résultats compilés, comparés aux traitements classiques, ont une valeur scientifique, même s’ils n’apportent pas des preuves irréfutables statistiquement. Néanmoins, l’augmentation du nombre d’études cliniques du même ordre ou avec davantage de patients (>= 100 cas) permettrait de consolider ces premiers résultats.

 Alors, évidemment, si personne ne se retrousse les manches et met en œuvre des études dites observationnelles quand même, on n’avancera à rien.

Je salue donc ce travail initial réalisé par Michel Pidoux en collaboration avec ces médecins. TamTam Phyto-Aroma s’inscrit donc dans cette lancée puisqu’une étude d’observation sur les maladies respiratoires  a eu lieu en 2020, faisant écho aux excellents résultats de leurs aînées.  

Interview de Michel Pidoux

Et voici le lien vers la vidéo ! Je vous souhaite une bonne visualisation !

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